Depuis la publication de mon appel du 30 Juillet 2013 pour la création d’un vaste mouvement citoyen à but unique: l’abolition de l’esclavage au Foutah Djallon, j’ai l’impression
d’avoir déclenché chez certains compatriotes négationnistes de cet esclavage chez eux au Foutah Djallon une diarrhée discursive et plumitive qui me surprend, m’inquiète et m’amuse à la fois. La
surprise vient du fait qu’il s’agit de concitoyens qui veulent se présenter comme des personnes modernes, des démocrates et des défenseurs des droits humains. Et qui se battent effectivement pour
cela, tant qu’il s’agit de leurs intérêts personnels. Mais ce combat devient tout à fait relatif, dès lors qu’il s’agit d’autres compatriotes « domestiqués » en silence, mais qui possèdent
pourtant les mêmes droits et devoirs constitutionnels qu’eux. Mon inquiétude s’explique par le constat de l’aveuglement de ces individus à vouloir défendre à tout prix un système arriéré et
criminel, en niant son existence. Le côté amusant de cette réaction repose sur la peur qui s’empare de certains, car la prise de conscience des victimes de ce système hideux, signifie la fin
d’une domination de type colonial qui dure depuis près de trois siècles, en vase clos, pour ainsi dire, à l’intérieur de la République de Guinée. Ces réactions épidermiques vont de l’injure la
plus grossière, aux accusations d’ignorance sur la société et les mœurs du Foutah Djallon, en passant par les menaces autant voilées qu’exprimées dans les termes les plus virulents contre ma
personne. Sur le Net, certaines caricatures me décrivent en « singe bonobo » ou en « Waffen SS-RPG ». La perte du contrôle de soi et la panique que provoque cet appel chez certains est le signe
que j’ai frappé le cœur du système, en disant la vérité, car c’est elle qui fait mal.
Du côté de l’hebdomadaire satirique « Le Lynx », en particulier, j’ai
modestement eu droit à trois articles dans le numéro 1115 du 26 août 2013 sur deux pages ! Ce qui constitue un exploit à enregistrer dans le « Guinness des hommes célèbres en Afrique ». D’autres
contradicteurs se sont illustrés sur le Net et dans les radios locales à Conakry. Eh bien tant pis pour les esclavagistes. Ils ne pourront plus se cacher derrière des formules hypocrites du genre
« Haali Pular », pour clamer une quelconque « communauté » entre le maître et l’esclave. Du temps du consensus national sur le « non » au référendum du Général De Gaulle en 1958, le Secrétaire
général du PDG-RDA, Sékou Touré, a tourné en dérision la « Communauté franco-africaine » chère au Général et au Président Houphouët-Boigny, en l’appelant la « communauté du cavalier et de son
cheval ». En effet il ne peut pas y avoir la moindre communauté de destin entre le maître et son esclave qu’il a spolié de ses terres, privé de sa culture et de sa langue, dressé comme un animal,
et qu’il continue de traiter en moins que rien. Comme c’est le cas aujourd’hui au Foutah Djallon (Moyenne Guinée) pour les Djallonka, les Maninka et les Pulli, et nulle part ailleurs en
République de Guinée. L’ignorance que mes contradicteurs manifestent à l’égard de l’histoire de leur propre région naturelle ne pourrait justifier leur arrogante cécité. Avant toute autre
réflexion sur ce thème, je vais exposer ci-dessous une bonne douzaine d’exemples pour illustrer mon propos, afin que l’on sache qu’il ne s’agit pas de « cas isolés ou fortuits », comme pourraient
le penser certains esprits simplistes :
Pour ceux et celles qui ne le savent pas, le Regroupement des Guinéens en
Europe (RGE), était un mouvement d’opposition au régime du PDG, qui a été créé le 1er mai 1970 à Francfort/M., en Allemagne Fédérale, sur l’initiative de trois compatriotes : Tirmiziou Diallo,
Mansour Kaba et Thierno Aliou Bah qui représentait Siradiou Diallo (paix à son âme). En 1972, ce mouvement s’est baptisé « Regroupement des Guinéens à l’Extérieur » (RGE). C’est ce mouvement qui
m’a affecté en Côte d’Ivoire en 1972, pour participer à l’organisation de l’opposition dans ce pays, en équipe avec Thierno Aliou Bah et Lambert Doré
(paix à son âme). Il m’aura fallu démissionner de mon travail d’Ingénieur en Génie civil en Allemagne, pour venir à l’aventure en Côte d’Ivoire, à mes frais, sans emploi, ni revenus garantis par
ailleurs. Ce groupe qui a été rejoint plus tard par d’autres amis venus d’Allemagne, Bakary Goyo Zoumanigui et N’Faly Kourouma, a mobilisé un bon nombre d’étudiants guinéens à l’université
d’Abidjan, parmi lesquels Souleymane Diallo, fondateur et directeur de publication de l’hebdomadaire « Le Lynx » et Alpha Sidoux Barry, un autre contradicteur zélé de mon appel susvisé. En dehors
de ces relations de militantisme, je ne me souviens pas avoir eu le moindre problème, ni aucun compte de quelque nature que ce soit à régler avec ces deux jeunes compatriotes. Ces deux frères
étaient étudiants à l’université d’Abidjan, au début des années 1970, alors que moi, j’avais obtenu un emploi en qualité de directeur général-adjoint du plus grand bureau d’études privé créé par
un citoyen Ivoirien, le Cabinet INTRADEP. C’est ce bureau d’études qui a géré sous ma direction, de 1972 à 1978, la plupart des grands projets
immobiliers du gouvernement (ministère de l’Habitat et ministère de la Défense) et des sociétés d’Etat comme la SOGEFIHA (Société de Gestion financière de l’Habitat) et la SETU (Société
d’Equipement des Terrains urbains) en Côte d’Ivoire. Et depuis 35 ans, je dirige mon propre bureau d’études, qui a conçu et géré la réalisation de plusieurs dizaines de grands projets de
développement dans plus de vingt pays d’Afrique et d’Asie. J’ignore par ailleurs tout sur les autres négationnistes qui se donnent du poids, en racontant à volonté sornettes et balivernes sur ma
personne, au lieu de donner des arguments objectifs contre ma déclaration. Voici le premier cas révoltant, tiré des activités du RGE :
Appelons-le par son patronyme, M. Camara. Il est originaire de Mamou. Je le
connais depuis 1953, à l’internat de Conakry-Donka. Il est de la même promotion que le Premier ministre Jean Marie Doré. Venus à Paris pour participer à une réunion du bureau exécutif national du
RGE au domicile de son président, feu Siradiou Diallo, (paix à son âme), mes amis Daniel Doré et son frère feu Lambert Doré (paix à son âme) trouvent M. Camara accroupi dans le couloir face au
salon de l’appartement de Siradiou Diallo. Daniel s’étonne de ce qu’il venait de voir et interroge son frère Lambert qui était, en ces temps-là, l’un des principaux lieutenants de Siradiou
Diallo. Celui-ci lui glisse à l’oreille : « C’est probablement un esclave ! ». Ce qui étonne le plus, c’est que notre compatriote M. Camara est un universitaire sain d’esprit qui enseigne dans
une université en Allemagne Fédérale. Si l’esclavage n’existait pas au Foutah Djallon, et si « les communautés de cette région vivaient en totale communion et harmonie », comme le dit Alpha
Sidoux Barry, je voudrais bien savoir quelle est la force invisible qui empêche un collègue de promotion de Siradiou Diallo d’accéder à son salon, à Paris, en France, et l’oblige à s’accroupir
dans le couloir pendant toute la durée de la réunion, au lieu de s’asseoir dans un fauteuil du salon comme les autres ? C’est en fait le résultat de près de trois siècles de domination
impitoyable, de dépersonnalisation de l’esclave, de dressage et de lavage de cerveaux pire que sous l’apartheid en Afrique du Sud. Il faut effectivement un très haut degré de cruauté pour amener
des êtres humains comme soi-même, à se plier à des comportements dignes d’animaux domestiques.
« Le petit parti familial DYAMA qui a été créé par Mansour Kaba » (dixit
Alpha Sidoux Barry) avait, dans son organigramme pour la Moyenne Guinée, un coordinateur régional pour le nord du Foutah Djallon à Labé et un autre pour le sud du Foutah Djallon à Mamou. Au cours
de la campagne électorale pour les élections législatives de juin 1995, notre coordinateur à Mamou, feu le capitaine Thierno Diallo (paix à son âme), me fait la remarque suivante, alors que nous
étions en route pour aller saluer feu El Hadj Boubacar Barry (paix à son âme), petit-fils de l’Almamy Bocar Biro : « Président, vous avez commis une erreur en désignant Moundjirou Barry (paix à
son âme) comme Secrétaire général du Parti DYAMA. Ce numéro deux de notre Parti ne pourra rien nous apporter au Foutah Djallon, car c’est un esclave. Comme nous allons chez El Hadj Boubacar
Barry, faites attention à l’endroit où il va s’asseoir, et là où moi, je vais m’asseoir ». Après les salutations d’usage, Moundjirou s’est effectivement assis sur la première chaise disponible à
l’entrée du salon, alors que le capitaine s’était installé sur le même divan que notre hôte, au fond du salon. Nous nous sommes regardés un moment et le capitaine m’a fait le signe du doigt sous
l’œil qui veut dire : « Voyez vous-même ce que je vous ai dit !» Et c’est naturellement lui qui était l’interlocuteur du descendant de l’Almamy Bocar Biro Barry.
C’est au cours d’une conférence avec des compatriotes et des Africains
résidant à Berlin en Allemagne en 2011, que j’ai, pour la première fois, dénoncé publiquement l’esclavage au Foutah Djallon. Au cours des débats qui ont suivi mon exposé, un compatriote dont je
ne donnerai ici que le patronyme, M. Barry, prit la parole pour manifester, de manière tout à fait innocente, son étonnement par rapport au phénomène que je venais de dénoncer. M. Barry dit à
l’assistance qu’il était originaire du Foutah Djallon, mais qu’il n’avait jamais constaté le moindre fait qui puisse correspondre à de l’esclavage chez lui en Moyenne Guinée. Ce qui laisse
supposer que je mentais, comme le dit superbement l’hebdomadaire satirique « Le Lynx » n° 1115 du 26 août 2013. J’ai dû répliquer en demandant à M.
Barry, si toutefois ses remarques étaient sincères, de bien ouvrir les yeux et les oreilles lors de ses prochaines visites en Guinée.
Quelques jours plus tard, alors que j’étais déjà revenu en Guinée, M. Barry
se retrouve en compagnie d’un compatriote, M. Magassouba, le premier responsable du Parti DYAMA à Berlin, qui avait co - organisé ma réunion de 2011 dans cette ville historique pour l’Afrique. Au
cours de cette soirée récréative, M. Barry a eu le malheur de toucher aux cheveux d’un autre compatriote, comme lui, originaire du Foutah Djallon. Celui-ci s’indigne et s’emporte, en demandant à
M. Barry, comment il peut oser toucher à ses cheveux. Ne pouvant retenir sa colère, ce compatriote apparemment Peuhl « noble » lance à M. Barry, en prenant à témoin M. Magassouba : « Barry ! Tu
oses toucher à mes cheveux ? Tu veux que je te dise ici en public ce que tu es ? Tu es un esclave ! Si nous n’étions pas en Allemagne, tu sais bien quel serait ton sort ! ». Humilié de la manière
la plus brutale en public, M. Barry qui avait, quelques semaines auparavant, nié l’esclavage au Foutah Djallon, s’est retiré tout doucement, sans plus importuner qui que ce soit. Cet exemple et
le précédent sont des illustrations de la situation des Pulli qui appartiennent à la première vague d’immigration citée dans mon appel du 30 juillet 2013 et qui sont traités comme des esclaves au
Foutah Djallon, bien qu’ils soient eux-aussi Peuhl et qu’ils portent les mêmes patronymes que les « nobles ».
Je demande humblement aux « Barry » qui m’insultent ou me critiquent, de
bien vouloir consulter leur propre arbre généalogique. Ils pourraient y découvrir des surprises ; cela leur permettra de calmer un tout petit peu leur ardeur négationniste, et, finalement, me
donner raison.
Dans la préfecture de Tougué, M. Coulibaly reçoit dans son village la visite
de compatriotes Peuhl qui venaient de terminer les travaux de construction d’une mosquée à côté de sa concession. Ces visiteurs présomptueux lui demandent le plus naturel du monde de quitter sa
maison qu’ils voulaient démolir, parce que, disent-ils, un esclave n’aurait pas le droit d’habiter à côté d’une mosquée. M. Coulibaly rétorque que ce sont les Peuhl qui seraient venus construire
leur mosquée à côté de sa concession. Il décide de ne pas bouger. Revenant un jour du travail, M. Coulibaly trouve des gens en train de casser d’autorité son mur de clôture. Son sang ne fait
qu’un tour. Il se jette sur la première personne qui était à sa portée. Le frère de celui-ci va chercher une hache pour assommer M. Coulibaly. Ce dernier esquive la frappe et l’agresseur touche
son propre frère qui succombe sur le coup. Selon le procès-verbal de gendarmerie que l’avocat de M. Coulibaly m’a donné à lire, le seul argument que les agresseurs ont avancé était que le père de
M. Coulibaly était leur esclave. C’est en fin 2012 que M. Coulibaly est sorti de prison, pour un crime qu’il n’a pas commis. Voilà le modèle de « coexistence pacifique et harmonieuse » que M.
Alpha Sidoux Barry et ses acolytes négationnistes de l’esclavage au Foutah Djallon veulent nous servir.
Dr. Madiou Traoré est pharmacien à Conakry. Il est vice-président de la «
Fondation pour la Réunification de Manden-Djallon pour la Paix », qui a été créé et agréé par Arrêté ministériel N° 5180/MDDL/CAB/SACCO/2008 du 22/12/2008. Son village Heremakonon dans la
sous-préfecture de Kankalabe, préfecture de Dalaba, au Foutah Djallon, a été considéré dans des travaux topographiques, comme faisant partie des terres de culture d’un Peuhl « noble » et vendu à
une tierce personne, qui aurait établi un titre foncier sur cette propriété. Du coup, tous les villageois se trouvent dépossédés de leurs terres ancestrales. Dr. Traoré se bat depuis des années
contre cette injustice. Il a même été emprisonné par un magistrat qui a abusé de son pouvoir et qui prétendait que le père de Dr. Traoré était l’esclave de son père. Une commission d’enquête
parlementaire a été dépêchée sur le terrain. Elle a donné raison aux villageois et à Dr. Traoré, mais jusqu’à ce jour, la justice suit son cours… L’Etat guinéen et sa justice ont encore beaucoup
à faire dans ce domaine. En attendant le verdict, Dr. Traoré reçoit quotidiennement des menaces de mort et des injures d’« esclave ingrat ». Comme si les Djallonka, les Maninka et les Pulli qui
sont traités ainsi devraient les remercier de les avoir colonisés et dépossédés de tout : culture, langue parlée, terres et dignité.
On a vu récemment le Parlement français débattre des « bienfaits de la
colonisation ». Comme si en Guinée, nous devrions un jour, applaudir les bienfaits de l’esclavage des bergers Peuhl immigrés au Foutah Djallon, qui ont colonisé les autochtones et les ont ensuite
soumis à un système d’esclavage mesquin et inhumain.
Le 13/06/2012, j’ai suivi à Conakry une émission radiodiffusée sur les
travaux de modernisation du Bloc A du marché de Koloma, dans la commune de Ratoma à Conakry. Selon ce qui se disait, les plans d’exécution de ce projet étaient approuvés et le financement des
travaux semblait assuré. L’avocat Me Tall du barreau de Conakry a, au cours de cette émission, dénoncé des compatriotes qui tentaient de disqualifier des investisseurs nationaux, en prétendant
que ceux-ci étaient des esclaves. Il s’agissait naturellement de concitoyens originaires du Foutah Djallon. Comment peut-on chercher à disqualifier un investisseur local, en le traitant d’esclave
? Ceci est un exemple concret de mentalité rétrograde qui milite contre le développement socio-économique de notre pays !
Au cours du mois de juin 2013, en venant acheter des fruits chez les
vendeuses du marché aux fruits de Kaporo-rails, dans la commune de Ratoma, l’atmosphère était lourde et empestée par une vendeuse qui tempêtait, allait et venait, tout en insultant une collègue
qu’elle traitait de « matchudô hudaadô ». Ce qui veut dire « esclave folle ». La gêne était générale et à mes questions sur les motifs de la colère de celle qui se comportait en « noble offensée
», personne n’a voulu ou osé répondre.
Le Rundè de Kabé dans la préfecture de Koubia, au Foutah Djallon, s’appelle
depuis peu le village de Kabé 2. Certains ressortissants de ce village qui ont prospéré dans le commerce chez moi à Kankan, ont construit une belle mosquée dont l’ouverture est retardée, parce
que les Peuhl « nobles » refusent de venir l’inaugurer. Et tant que ces dignitaires féodaux ne viennent pas inaugurer la mosquée, elle ne peut pas abriter les prières des croyants.
Le Rundè de « Tenguefakha » rebaptisé « Nassroulaye » dans la préfecture de
Koubia vient aussi de construire une mosquée dont l’inauguration attend la bonne volonté des Peuhl « nobles ».
10. Le troisième exemple de mosquées dont l’inauguration est retardée par
les « nobles » se trouve dans le Rundè de Wouppirguel, sur la route de Koubia dans la préfecture de Labé, sous-préfecture de Sannou. On exige ici que l’imam soit un Peuhl « noble » ! Si non, pas
de prières dans cette mosquée !
11. Un membre de la délégation de la coordination de la Haute Guinée m’a
rapporté un événement lié au baptême de l’enfant d’un officier supérieur originaire du Foutah Djallon dont je tairai le nom ici. Cet officier membre du CMRN et membre du premier gouvernement du
régime militaire du Général Lansana Conté avait invité des représentants des quatre coordinations régionales résidentes à Conakry. Lorsque la délégation de la Haute Guinée arrivait dans la cour
du ministre, un bélier blanc était attaché en bonne place, pour le sacrifice rituel. Et à l’arrivée de la délégation de la Moyenne Guinée (Foutah Djallon), l’on vit les membres de cette
délégation se demander comment se fait-il que cet officier ait voulu sacrifier un bélier blanc, en lieu et place du bouc noir qui sied à sa condition d’esclave. D’un tour de mains, le bélier
blanc disparut et fut remplacé par un bouc noir qui fut immolé publiquement. C’est parce qu’au Foutah Djallon, les esclaves ne sont pas autorisés à sacrifier des béliers blancs comme leurs
maîtres Peuhl « nobles ». Ils doivent sacrifier des boucs noirs pour souligner leur état d’infériorité par rapport à leurs maîtres. Cette règle est exigée quel que soit le niveau de fortune de
l’esclave et l’endroit où il vit.
12. M. Barry qui militait dans
un grand parti d’opposition à Sanoyah à Conakry, a démissionné de ce parti pour rejoindre un autre parti de la mouvance présidentielle, suite aux remontrances de ses collègues Peuhl « nobles »
qui lui reprochaient d’avoir, à l’occasion d’un baptême, immolé un bélier blanc, en lieu et place du bouc noir réservé aux esclaves. Nous devrions un jour, organiser à travers le Foutah Djallon,
une caravane nationale pour que des esclaves notoirement connus comme tels, sacrifient dans toutes les villes traversées des béliers blancs, afin de mettre fin à ces pratiques discriminatoires
d’un autre âge.
13. Dans cette région, les
esclaves ne peuvent accéder à des terres de culture que s’ils attachent la cola pour aller s’agenouiller devant le Peuhl « noble » qui lui accorde le droit d’exploitation pour une durée très
limitée. Il arrive souvent qu’à la fin de la récolte, le maître vienne s’emparer de toute la production annuelle de l’esclave qui n’a aucun recours en zone rurale. En 2011, Mme le Préfet de Pita,
une Djallonka d’origine, dut intervenir énergiquement pour empêcher les exploiteurs oisifs de garder la production des paysans dont ils s’étaient déjà emparée comme à l’accoutumée.
14. Ce quatorzième exemple me semble être le plus révoltant. Le dimanche 14
juillet 2013, je rends visite à l’aîné de ma famille qui réside à Conakry depuis plus de cinquante ans. Il fait partie des premiers occupants du quartier spontané de Hamdallaye, dans la commune
de Ratoma. Il a géré pendant plus de cinquante ans son propre restaurant populaire au marché de Madina qui est le plus grand marché de Conakry et l’un des plus grands de la sous-région. La
société guinéenne pratique généralement ceci de particulier, que ceux qui viennent s’installer dans la capitale cherchent toujours à se regrouper en communautés plus ou moins homogènes. Ces
habitants des nouveaux quartiers spontanés reproduisent systématiquement les us et coutumes du village, de telle sorte que l’on n’a pas besoin d’aller habiter dans une région naturelle, pour
connaître les modes de vie de ses voisins. Lorsque j’ai commencé à parler de l’esclavage au cours de la visite chez mon frère aîné, il m’a, entre autres, cité le cas d’un de ses voisins Peuhl «
noble » à Hamdallaye, qui reçoit à l’occasion de chaque fête de Ramadan et de Tabaski la visite d’un de ses esclaves qui est mécanicien-garagiste à Conakry. En guise de soumission, le visiteur se
met à quatre pattes devant le Peuhl « noble » et celui-ci pose ses deux pieds sur son dos. Et c’est ainsi que se déroule la conversation entre les deux compatriotes.
Il semblerait que cette pratique ne soit pas un cas isolé. Une grande dame
Peuhl, épouse d’un dignitaire du PDG-RDA dont je tairai le nom, avait, elle-aussi, l’habitude de se détendre, en posant ses deux pieds sur le dos de l’une de ses nombreuses « captives domestiques
».
Qui peut parler de « communauté » entre ces deux groupes de personnes ? Ce
sont justement ces pratiques négationnistes de l’être humain qui divisent le Foutah Djallon et non pas ceux qui, comme, le Président de la République et moi-même, les dénoncent et les
condamnent.
En plus de ces quatorze exemples tirés de la vie réelle des populations
concernées tant en Guinée, qu’à l’étranger, il y a de nombreux témoignages écrits qui confirment la réalité et l’actualité de l’esclavage en ce début du XXIe siècle au Foutah Djallon. Je m’en
tiendrai ici à la lettre ouverte de la « Fondation Mandén Djallon » susvisée du 05/08/2010 adressée au Président de la République par Intérim et aux autres institutions républicaines de la
période de la Transition, d’une part, et à la réponse cinglante que Dr. Mamadou Baïlo Camara, Enseignant Chercheur à l’Université Le Havre en France, a publiée sur le Net en réponse aux
dénégations de notre compatriote Alpha Sidoux Barry, d’autre part :
Dans cette lettre ouverte N°39/FRMDP du 05/08/2010 signée par M. Aliou Diao
et Dr. Madiou Traoré, respectivement secrétaire administratif et vice-président de la Fondation Mandén Djallon, on peut lire : « Cependant, nous voulons attirer votre attention sur certaines
réalités vécues en Moyenne Guinée, avant, pendant et après cette élection (présidentielle de 2010). En effet, notre Fondation a eu à constater les faits suivants: plusieurs cas d´intimidation,
d’insultes, de menaces, d´expropriation des terres cultivables, d’agressions physiques, d’arrestations arbitraires et de morts d´hommes. Ces cas se sont produits dans divers endroits
dont notamment à Mitty, Kébaly, Kankalabé dans Dalaba, à Gongoré dans Pita, à Sanana dans Tougué, à
Dounkiba dans Mamou. Tous ces faits ont été menés sur des considérations purement ethniques et „esclavagistes“, qui sont des pratiques anachroniques condamnées partout dans le monde ». Sans
commentaires.
Dans sa « Réponse à Alpha Sidoux Barry à propos de l’esclavage au Fouta
Djallon » publiée le 17/08/2013 sur « guineelive.com/8-actualite/554 », Dr Mamadou Baïlo Camara écrit : « Cher Frère, le 6 août 2013, vous avez publié un article sur le site de « aminata.com »
dans lequel vous niez l’esclavage au Fouta Djallon. J’ai l’impression que vous cherchez à régler des comptes avec M. Kaba Mansour, et si c’est le cas, continuez votre besogne sans chercher à nier
l’évidence, mon Frère…. » Dr. Camara continue : « M. Sidoux, si vous ne savez pas, je vous informe que l’esclavage existe bien au XXIe siècle au Fouta Djallon. Cette information ne vient pas d’un
touriste qui a visité le Fouta Djallon, mais d’un fils de Mamou. Bref, je persiste et je signe à qui veut l’entendre ou pas « que l’esclavage existe bien au XXIe siècle au Fouta Djallon… » Et Dr.
Camara insiste en écrivant : « A l’attention de ceux qui ne savent pas, les propos ci-dessous de M. Kaba sont effectivement une réalité au Fouta Djallon ».
J’ai passé sous silence les nombreux exemples que Dr. Mamadou Baïlo Camara a
cités pour illustrer sa réplique, du genre de ceux que j’ai énumérés dans le présent document. J’ajoute qu’il suffit de s’entretenir sur ce sujet avec un compatriote qui a vécu quelques temps
avec des amis ou des voisins originaires du Foutah Djallon, pour se rendre compte de la réalité de l’esclavage qui divise les habitants de cette région naturelle de la République de
Guinée.
Pour ceux qui veulent encore d’autres preuves, je fais cette fois-ci appel
aux documents produits par un autre chercheur originaire du Foutah Djallon dont les publications viennent de l’IFAN (Institut fondamental d’Afrique Noire) sis à Dakar, Sénégal.
Sur « info@webfuuta.net », M.
Thierno Diallo publie les extraits d’un ouvrage dans la « Collection Initiations et Etudes africaines de l’IFAN, 1972, 276 pages les lignes suivantes relatives aux esclaves :
« Si un certain nombre de Jalonke a accepté de se convertir et fut pour
cette raison laissé en liberté, une bonne partie d’entre eux refusa l’Islam. Ils furent les premiers esclaves des Peuls au Fuuta. Ils continuaient à vivre sur les terres qu’ils cultivaient avant
la conquête, mais en revanche, les produits de leurs cultures ne leur appartenaient plus ». Et M. Thierno Diallo de poser la question, avec une tentative de réponse :
« Mais pourquoi l’esclavage au Fuuta Dyalon ? De tout temps on a parlé de
l’esclavage pratiqué par les Peuls considérés comme « d’affreux esclavagistes ». Cependant, rarement on s’est demandé les raisons véritables de ce besoin d’esclaves au Fuuta. Faudrait-il sans
cesse rappeler que le Peul était et demeure physiquement un être faible, incapable de résister aux travaux pénibles qu’exigeait la culture des champs surtout sur un sol latéritique et pauvre
comme celui du Fuuta ? A cette faiblesse s’ajoutait l’aversion ou plutôt la répugnance presque maladive que le peul éprouvait à l’égard des travaux agricoles. Comment ne pas expliquer ce mépris
par la fierté du nomade et sa prétendue supériorité sur le sédentaire rivé à la terre ? ». Plus loin, l’auteur écrit : « S’il est vrai que les esclaves habitaient des villages de culture (runde,
pl. dume) séparés de ceux des Peuls (fulaso ou marga), ils disposaient néanmoins de nombreux avantages souvent inconnus ailleurs : des champs, des bœufs, des moutons et des chèvres et sur le plan
politique des assemblées où ils pouvaient élire librement leur chef de village : manga runde ». Dans cet ouvrage, on trouve tous les termes que j’ai utilisés dans mon appel du 30/07/2013, y
compris le terme Pulli dont Alpha Sidoux Barry niait péremptoirement l’existence. M. Thierno Diallo écrit à cet effet : « Les Peuls-pulli convertis furent maintenus à leurs terres sans changement
notable. Il suffisait pour cela, de leur enlever une partie de leur bétail pour les rendre économiquement dépendants de la terre ». Je constate ici que M. Alpha Sidoux Barry voulait ridiculiser
le terme « Pulli » par pure malhonnêteté intellectuelle. Pitié pour le personnage !
Une note explicative sur le terme « d’affreux esclavagistes » fait appel au
célèbre ethnologue spécialiste du Foutah Djallon, l’administrateur des colonies Gilbert Vieillard qui aurait écrit dans « Notes sur les Peuls en 1939 » : « La conquête musulmane a fait de la
razzia et du dressage des serfs la principale occupation des nobles, ci-devant pasteurs et l’esclavage a porté un rude coup à la dignité du travail manuel. « Travailleurs » et « esclaves » sont
synonymes (huuwoowo = maccudo) et ces assimilations verbales engendrent des associations mentales durables. Chez les nobles, ne travaillent que celui qui n’a pas su acquérir d’esclaves,
c’est-à-dire le lâche, le faible et le malchanceux, toutes catégories détestables. Dieu a imposé le travail à notre Père Adam, il a créé ces Païens au crâne dur et aux bras forts, bons tout au
plus pour le travail de la terre, et évidemment destinés à servir les croyants », o. c. p. 137 de « Notes sur les Peuls, 1939 ». Le seul commentaire que je formulerais ici consiste à signaler que
le premier mouvement politique créé par les originaires du Foutah Djallon en 1945 s’appelait « L’Amicale Gilbert Vieillard ». Ce qui marque le crédit que les premiers hommes politiques du Foutah
Djallon accordaient à l’auteur de ces quelques lignes, plus que révélatrices de la réalité de l’esclavage dans cette Région et du système qui a été mis en place pour « domestiquer » les
autochtones vaincus de la bataille de Talansan en 1727.
Je voudrais maintenant répondre aux deux questions cruciales suivantes :
Pourquoi parler de l’esclavage au Foutah Djallon et pas ailleurs en Guinée ? Et pourquoi maintenant et pas à un autre moment ?
Les réponses subjectivistes et faussement indignées de ceux qui critiquent
ma déclaration montrent que mes détracteurs ne savent rien ni du passé, ni du présent de leur société d’origine. Ou alors ils nient l’esclavage chez eux pour couvrir un agenda caché que j’aurais
commis l’impudence de mettre à nu. Nous sommes désormais décidés à dénoncer l’esclavage au Foutah Djallon, jusqu’au jour où le Parlement guinéen adoptera une loi sur son abolition définitive sur
toute l’étendue du territoire de la République de Guinée. Je suis désolé par ailleurs de constater que ce système esclavagiste n’existe nulle part ailleurs en République de Guinée, sinon dans le
milieu de la communauté Peuhl du Foutah Djallon, partout où elle réside dans le monde.
Pourquoi cette dénonciation maintenant ? Lorsque vous demandez à un esclave
s’il veut être libre aujourd’hui ou demain, il vous répondra qu’avant-hier était déjà trop tard ! S’agissant des libertés fondamentales qui sont garanties par plusieurs articles de la
Constitution de la République de Guinée, dont l’article 8 de manière spécifique, chaque moment est le bienvenu pour ce combat. Mes détracteurs doivent savoir que je n’ai pas attendu l’annonce de
la campagne des élections législatives 2013 pour engager cette lutte contre l’esclavage au Foutah Djallon. J’ai lancé les premières salves là-dessus début 2011 au cours d’une émission « Guinée
Mémoires » sur la radio privée « Djoliba - FM » avec le journaliste Sékou Mady Traoré. D’autres interviews et conférences ont suivi au cours des années 2011 à 2013. Cette lutte doit continuer
indépendamment de toutes les campagnes électorales, jusqu’à l’abolition de l’esclavage en République de Guinée. Cela ne pourra pas se faire sans soulever des « réactions indignées » au niveau des
bénéficiaires du système esclavagiste qui voudront garder leurs privilèges au détriment des autres. Pour ma part, j’ai choisi de combattre aux côtés des victimes dépossédées, déshumanisées et
sans recours depuis près de trois siècles. Cette question est du reste trop importante pour qu’on en face un thème de campagne électorale, ni non
plus comme un sujet de débats politiciens. Tous ceux qui veulent sauver l’honneur de la Guinée devront se donner la main pour nous débarrasser de cette honte du XXIe siècle.
Dans ce contexte, je voudrais m’inscrire en faux contre deux inepties qui
sont avancées par certains négationnistes de l’esclavage au Foutah Djallon :
a) Alpha Sidoux
Barry prétend que l’esclavage aurait été supprimé en 1957 en Guinée. Erreur ! La conférence administrative qui a été organisée par Sékou Touré, alors Vice-président du Conseil de gouvernement de
la Guinée française avait pour objectif la suppression de la chefferie de canton et non celle de l’esclavage. La chefferie de canton fut supprimée, mais aucune loi n’a jamais été promulguée au
cours des années 1950 pour l’abolition de l’esclavage ni en Guinée, ni ailleurs au sein de l’ex-Afrique occidentale française (ex-AOF). Quant à la loi cadre de Gaston Deferre, elle accordait aux
colonies françaises d’Afrique l’autonomie interne qui a été critiquée sous le terme de « balkanisation de l’Afrique ». Ceux qui parlent de l’abolition de l’esclavage en 1848 en France ignorent le
fait qu’aucune parcelle du territoire guinéen n’était encore colonisée par la France en ce moment-là…
b) D’autres
négationnistes prétendent à dessein que ce serait l’Almamy Samory Touré qui, vers la fin du XIXe siècle, aurait vendu des esclaves au Foutah Djallon. Archi-faux ! L’esclavage a été introduit au
Foutah Djallon après la Bataille de Talansan en 1727, et la victoire des Peuhl islamisés sur les Djallonka, les Maninka et les Pulli, alors animistes. A l’issue de cette bataille décisive, les
troupes victorieuses ont déclaré l’Etat théocratique du Foutah Djallon.
Cet Etat a proclamé toutes les terres du Foutah « propriété d’Allah ». Et
comme l’Almamy du Foutah Djallon était le « Représentant du Bon Dieu sur terre », il est devenu ipso facto le propriétaire de toutes les terres de ce territoire nouvellement conquis. Du coup, les
autochtones qui n’ont pas pu s’exiler dans les quatre points cardinaux autour du Foutah sont devenus esclaves des nouveaux conquérants qui se sont alors partagé les terres ancestrales de leurs
hôtes. Cette entreprise de colonisation sous le prétexte d’islamisation ne pouvait se consolider que par une politique d’aliénation, de dépersonnalisation, de dressage des autochtones, de lavage
des cerveaux et d’exploitation qui dure depuis près de trois siècles.
Comment peut-on honnêtement se moquer de ceux qui appellent cette politique
« système d’esclavage ». Car un système est, dans ce cas, un ensemble organisé et structuré dont toutes les actions tendent à obtenir un résultat fixé d’avance et selon une stratégie
convenue.
Les différentes interventions de l’Almamy Samory Touré, l’Empereur du
Wassoulou, au cours du dernier tiers du XIXe siècle au Foutah Djallon avaient pour objectifs :
a) La réduction, en 1891, de la révolte des « Houbou » dirigés par Karamoko
Abal (fils de Karamoko Alpha Mamadou Diouhé). Ceux-ci s’étaient révoltés contre le pouvoir central des Almamy de Timbo. Ils ont créé une république libre de tout esclavage dans les montagnes du
Fitaba, avec pour capitale Bokéto. Ce nouvel Etat dissident survécut pendant une trentaine d’années, après avoir saccagé Timbo, la capitale du royaume théocratique du Foutah Djallon. Gilbert
Iffono écrit dans son ouvrage le « Lexique historique de la Guinée-Conakry », Editions L’Harmattan, Paris, 1992 : « Attaqué en 1873 par les almamy, Abal triompha avec ses hommes de l’armée
confédérale. Ce fut un véritable désastre pour l’almamy Sory Daara, tué dans les combats en compagnie de nombre de ses fils et vaillants guerriers devant Bokéto, la capitale houbou ». Il fallut
une coalition de l’Almamy Samory Touré avec les Almamy de Timbo pour écraser les Houbou.
b) La défense de l’Almamy Bocar Biro Barry dans sa guerre contre les troupes
françaises d’occupation coloniale. Trahi par certains de ses frères dont je tairais le nom ici, ce sont, selon El Hadji Boubacar Barry d’Almamya à Mamou (paix à son âme), treize chefs Sofa de
l’Almamy Samory Touré qui sont morts en défendant son grand-père Bocar Biro. Et qui a livré la tête de l’Almamy Bocar Biro au gouverneur français du moment ? Réduire les deux interventions de
l’Almamy Samory Touré en faveur des Almamy du Foutah Djallon à de simples opérations commerciales de ventes d’esclaves est d’une malhonnêteté criminelle.
Il serait important de savoir que ces deux interventions ont été chaudement
recommandées par Karamô Mory Kaba, chef de l’exécutif de Kankan (« Kanda ») et autorité religieuse à laquelle l’Almamy Samory Touré vouait un grand respect. Cela, en vertu d’une alliance
séculaire entre les Almamy de Timbo et les Kaba de Kankan, qui ont participé à la guerre sainte d’islamisation du Foutah Djallon sous le commandement de M’Bemba Alpha Kabinè Kaba.
Le Foutah Djallon est l’une des très rares régions du monde dont
l’islamisation par une Djihad (guerre sainte) a été consolidée par une colonisation des autochtones, en leur enlevant leurs terres, leur culture, leur langue et leur dignité. Trois siècles de
dressage et de domptage des populations soumises sans recours ont abouti aux comportements scandaleux que je viens de révéler dans ce document.
Si après toutes ces informations, mes détracteurs du « Lynx » et d’autres
organes de la presse écrite, en ligne ou des radios privées veulent porter plainte contre ma personne pour quelques raisons que ce soit, c’est avec un très grand plaisir que je répondrai à leurs
accusations devant les tribunaux de la République. Mais ils ne devront pas se contenter de nier l’évidence. Il faudra qu’ils apportent des arguments pour prouver que Mansour Kaba est un menteur,
en disant et en écrivant que l’esclavage persiste encore dans les us et coutumes des Peuhl « nobles » du Foutah Djallon.
En attendant ces accusations, je leur livre la partie du « Serment des
chasseurs du Mandé sur l’esclavage ». Ce texte qui date des années 1230 avant la bataille de Kirina, fondatrice de l’Empire du Mali, soit plus de cinq siècles avant la Révolution française de
1789, a été recueilli par l’Anthropologue Malien Youssouf Tata Cissé et publié en langues maninka et française dans l’ouvrage « La Charte de Kurukan Fuga » par le CELHTO, Editions L’Harmattan,
Paris 2008. C’est une belle et grande leçon pour les esclavagistes arriérés qui pratiquent aujourd’hui encore « la chose », tout en niant son existence.
« Les chasseurs déclarent :
La faim n’est pas une bonne
chose,
L’esclavage n’est pas non plus une
bonne chose ;
Il n’y pas pire calamité que ces
choses-là
Dans ce bas monde
Tant que nous détiendrons le
carquois et l’arc,
La faim ne tuera plus personne au
Manden,
Si d’aventure la famine venait à
sévir ;
La guerre ne détruira plus jamais
de village
Pour y prélever des esclaves
;
C’est dire que nul ne placera
désormais le mors dans la
Bouche de son semblable
Pour aller le vendre ;
Personne ne sera non plus
battu
A fortiori mis à mort,
Parce qu’il est fils
d’esclave.
Les chasseurs déclarent
:
L’essence de l’esclavage est
éteinte ce jour,
D’un mur à l’autre, d’une frontière
à l’autre du Manden ;
La razzia est bannie à compter de
ce jour au Manden ;
Les tourments nés de ces horreurs
sont finis à partir de ce
Jour au Manden.
Quelle épreuve que le tourment
!
Surtout lorsque l’opprimé ne
dispose d’aucun recours.
Quelle déchéance que l’esclavage
!
Nulle part dans le
monde.
Les gens d’autrefois nous disent
:
L’homme en tant
qu’individu
Fait d’os et de chair,
De moelle et de nerfs
De peau recouverte de poils et de
cheveux
Se nourrit d’aliments et de
boissons ;
Mais son âme, son esprit vit de
trois choses
Voir ce qu’il a envie de
voir,
Dire ce qu’il a envie de
dire
Et faire ce qu’il a envie de faire
;
Si une seule de ces choses venait à
manquer à l’âme
Humaine,
Elle en souffrirait
Et s’étiolerait
sûrement.
En conséquence, les chasseurs
déclarent :
Chacun dispose désormais de sa
personne,
Chacun est libre de ses
actes,
Chacun dispose désormais des fruits
de son travail.
Tel est le serment du
Manden
A l’adresse des oreilles du monde tout entier ».
Je constate ici que les chasseurs du Manden du treizième siècle étaient plus
modernes et plus progressistes que nos « affreux esclavagistes » du XXIe siècle au Foutah Djallon. Qui peut être fier d’un tel retard mental et comportemental ?
En définitive, la « tempête dans un verre d’eau » que veut soulever le
quintet d’extrémistes mythomanes et manipulateurs en parlant de « génocide contre les Peuhl au Foutah Djallon », s’arrêtera au niveau de leurs
rêveries dans les cafés de Paris. Ces manœuvres de diversion sont une preuve de leur embarras, face à la dénonciation de l’esclavage qui est aujourd’hui encore de pratique courante chez eux. Ce
qui me semble malheureux et pitoyable, c’est que ce sont souvent les victimes de ce système criminel qui, soit par peur, soit par une honte compréhensible, sont les premiers à nier l’évidence.
D’où le message suivant : prenez courage ! La lutte que nous venons d’engager ne sera pas un feu de paille. Elle sera énergiquement conduite jusqu’à son terme logique : l’abolition de l’esclavage
au Foutah Djallon et sur toute l’étendue de territoire national. Notre politique du changement ne s’arrêtera pas devant le porche des esclavagistes impénitents.
Honte à eux !
Fait à Conakry, le 29 Septembre 2013