La semaine dernière, celui
qui a été désigné président en Guinée par la CENI a provoqué notre indignation en minimisant les viols commis le 28 septembre 2009 au stade à Conakry. Il a osé dire que « le 28 septembre n’a
enregistré que des viols ». Et ce monsieur veut parler de réconciliation nationale ?
On va lui rafraîchir la mémoire puisqu’il n’était pas au stade, mais très loin de la Guinée, aux Etats-Unis laissant ses collègues
de l’opposition oser faire les revendications. Pourquoi a-t-il déserté le stade alors qu’il avait promis le contraire ? Lui seul le sait, en son âme et conscience.
Que sait-il passé le 28 septembre au stade ?
S’il se le rappelle, il y a eu une commission d’enquête mandatée par l’Organisation des Nations Unies pour faire la lumière sur les
évènements du 28 septembres. Les conclusions de cette commission sont sans équivoque. Elle écrit « la Commission est en mesure de confirmer l’identité de 156 personnes tuées ou disparues […] Elle
confirme qu’au moins 109 femmes ont été victimes de viols et d’autres violences sexuelles, y compris de mutilations sexuelles et d’esclavage sexuelles. Plusieurs femmes ont succombé à leurs
blessures suite à des agressions sexuelles particulièrement cruelles ».
Oui Alpha Condé, il y a eu des assassinats en masse, des viols, des actes de torture inouïs, des traitements dégradants et autres
barbaries sans parler de vol systématiques d’ objets comme l’argent et les portables par les agents du pouvoir. Il n’y a pas eu que des viols. Sur ce point vous êtes en contradiction avec le CNDD
qui lui nie les viols.
Le viol est un crime et non une simple contravention
En résumant toutes les atrocités en de simples viols, le prétendu professeur de droit, dont on ignore la spécialité dans les
matières juridiques, a voulu banaliser ces actes, les minimiser pour sans doute expliquer l’absence de toute intention d’en poursuivre les auteurs et surtout expliquer pourquoi les auteurs sont
associés à la gestion du pouvoir d’Alpha Condé.
Il faut qu’Alpha Condé sache que les infractions pénales sont hiérarchisées. Tout en haut de la pyramide il y a les crimes qui sont
les infractions les plus graves. Ensuite viennent les délits et enfin les contraventions.
Dans la catégorie des crimes, on trouve les assassinats, les homicides et les viols, des infractions que ledit Professeur ne semble
pas vouloir poursuivre en justice.
Dans les délits on trouve le vol, là le Président désigné par la CENI est très sélectif car il a établi une liste des pseudos
voleurs sans en apporter une preuve concrète qu’il somme de rendre des terrains et les deniers. Le plus consternant même pour des non juristes à fortiori venant d’un « professeur de droit » est
que parmi les personnes qui doivent poursuivre les voleurs, figurent des criminels. Une telle idée de la justice laisse complètement abasourdie.
En dernier, il y a les contraventions, comme l’inobservation du code de la route. Là encore nous observons du zèle des agents de
l’Etat même quand ils ne sont pas en service, qui se permettent de molester des automobilistes. N’oublions pas de préciser au passage que beaucoup de ces agents sont eux même des chauffards qui
pensent qu’ils ne sont pas soumis au code de la route.
Ainsi Alpha Condé, vous savez maintenant que le viol est un crime grave. Dans la plupart des législations du monde, le viol est
considéré comme un crime. L’article 321 du Code pénal guinéen dispose que « tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence,
contrainte ou surprise, constitue un viol. Le viol sera puni de la réclusion criminelle à temps de cinq (5) à dix (10 ans) ». Cette peine est de dix (10) à vingt (20) ans en cas de circonstance
aggravante. Une de telle circonstance existe lorsque le viol est commis sous la menace d’une arme, par des complices ou par une personne qui a abusé
de l’autorité que lui confèrent ses fonctions.
La communauté internationale aussi incrimine le viol. Les actes de viols peuvent être constitutifs de crime contre l’humanité. Ainsi
le Statut de la Cour pénale internationale qui dans son préambule affirme que les États Parties au présent Statut, sont déterminés à mettre un terme
à l’impunité des auteurs de ces crimes, citent à l’article 7 g « les viols, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée, les grossesses forcées, la stérilisation forcée ou toute autre forme de
violence sexuelle de gravité comparable » comme pouvant constituer des crimes contre l’humanité lorsqu’ils sont commis de manière systématique.
La gravité des viols commis le 28 septembre ne fait aucun doute. Voici ce qu’en dit la Commission d’enquête des Nations Unies
« L’expert médico-légal de la Commission a observé des ecchymoses au tiers supérieur de la face interne des cuisses chez plusieurs femmes, ainsi que des lésions dans les zones génitales, compatibles avec des sévères violences
sexuelles et vaginales… Les femmes ont été déshabillées, souvent par la force et le recours à des armes blanches, y compris des ciseaux dans certains cas […] Au moins cinq d’entre elles ont été
battues au niveau du ventre et de la vulve avec des bâtons, matraques, crosses ou couteaux. Une d’entre elles a été battue avec un fil électrique. […] La Commission a identifié 77 viols commis
par un ou plusieurs auteurs, jusqu’à six dans un cas, qui ont souvent été accompagné d’autres formes de violence extrême. Quarante deux femmes ont été violées par plusieurs militaires, viols
accompagnés parfois, avant ou après, de pénétration des objets ou la main. Elles ont identifié comme auteurs de ces actes les bérets rouges, dont certains cagoulés, les gendarmes de Thiegboro et
quelques miliciens ».
Si Alpha s’embrouille dans sa conception du droit international, on lui rappelle que la Guinée est partie au Statuts de la CPI et
l’absence de volonté des autorités guinéennes de poursuivre les auteurs des crimes contre l’humanité donnent compétence à cette Cour pour nous aider à mettre fin à l’impunité qui règne en Guinée
depuis 1958.
Les Etats-Unis, même s’ils ne font pas parties au Statut de Rome et tous les pays où règnent la démocratie poursuivent les auteurs
des viols. Ils ne minimisent pas de tels crimes.
Ces crimes font l’objet d’une condamnation unanime des Nations unies. Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté plusieurs résolutions
dans ce sens. Selon la Représentante spéciale du Secrétaire général chargée de la lutte contre les violences sexuelles dans les conflits armés, Margot Wallström, « ceux qui utilisent la violence sexuelle pour punir, humilier, terroriser ou déplacer commettent des crimes contre
les victimes et des crimes contre l'humanité ». En RDC ce sont neuf (9) soldats qui viennent d’être condamnés à vingt ans de réclusion pour le viol d’une soixantaine de femmes.
La responsabilité des autorités guinéennes ne fait aucun doute
Comme l’a rappelé la Commission internationale d’enquête, l’Etat guinéen est responsable des violations commises par ses agents
militaires, gendarmes et policiers, ainsi que des violations commises par les milices qui ont coopéré avec les forces de sécurité. La première responsabilité de l’Etat est celle de protéger la
population de graves violations des droits de l’homme, obligation qui découle de plusieurs instruments internationaux ratifiés par la Guinée et du droit international coutumier.
Les forces de sécurité ont montré qu’elles étaient incapables de protéger la population. La deuxième responsabilité de l’Etat est de
mener des enquêtes efficaces et de traduire les responsables, droit garanti par plusieurs conventions internationales et par le droit coutumier international. On note que le gouvernement guinéen
est loin de s’acquitter de cette obligation.
Parmi les responsables mis en cause pour crimes contre l’humanité :
• Fodeba Isto Keira qui au moment des faits était Ministre de la Jeunesse et du Sport et Directeur du stade. Il a participé à la destruction des preuves.
• Fatou Sikhè Camara, directrice de l’hôpital Donka, qui a favorisé la prise de contrôle de l’hôpital par les militaires, refus des soins et dissimulation des
faits.
• Le général Mamadouba Toto Camara, alors Ministre de la sécurité publique. Sa responsabilité est engagée pour les faits commis par ses subordonnés, les policiers.
• Marcel Koïvogui, aide de camp de Toumba Diakité.
• Toumba Diakité
• Sankara Kaba, le chauffeur de Dadis Camara, identifié par de nombreux témoins
• Le Colonel Abdoulaye Chérif Diaby, alors ministre de la Santé
• Claude Pivi (Coplan), ministre chargé de la sécurité présidentielle.
• Thiegboro Camara, ministre chargé de la lutte contre la drogue et le banditisme
• Dadis Camara, président auto proclamé et président du CNDD
• Sekouba Konaté, en sa qualité de Ministre de la Défense dont les hommes sont les auteurs des exactions et atrocités commises.
Poursuite de l’impunité par Alpha Condé
Alpha Condé, sous le leurre de changement poursuit une politique d’impunité à l’égard d’auteurs de crimes. Ses propos visant à
minimiser les actes de viols, en niant les personnes tuées et disparues rentrent dans cette politique qu’il veut couvrir avec sa mascarade de réconciliation nationale. Il parle d’oublier et de
pardonner.
Pire que cette absence de volonté de poursuivre les criminels, il les promeut. Ainsi il a confirmé ou promu de nombreuses personnes
soupçonnées de crimes contre l’humanité. Le général Mamadouba Toto Camara est maintenu à son poste de ministre de la Sécurité et de la Protection civile. Alpha Condé l’a même gratifié du titre
pompeux de Ministre d’Etat. Claude Pivi conserve son ministère sans sens de sécurité présidentielle.
Par un autre décret se rapportant aux forces armées, ce ministre-garde-corps ou
garde corps ministre a été confirmé à l’état major de l’armée de terre de même que Tiegboro Camara. Le colonel Tiegboro Camara garde sa fonction de
directeur de l’Agence nationale chargée de la lutte contre la drogue, des crimes organisés et du terrorisme. Un criminel est donc chargé de lutter contre le crime.
Après le 28 septembre d’autres crimes graves ont été commis par les forces de l’ordre. Alpha Condé n’a jamais entamé une quelconque
action contre eux. Il en est ainsi des massacres, incendies volontaires et destruction des biens à caractère ethniques qui ont entaché les élections.
Human Right Watchécrivait que « les forces de sécurité en Guinée ont fait usage d’une force excessive et fait preuve de manque de neutralité politique lors de
leur réponse aux violences liées aux récentes élections ». Alpha Condé a confirmé le Général Ibrahima Baldé comme chef d’état major de la Gendarmerie. La Fossepel dirigée par le général Baldé sensée sécuriser le processus électoral a commis de nombreuses exactions pendant la transition, surtout entre les
deux tours de l’élection et à l’annonce de ses résultats.
Alpha Condé est même complice de colportage de fausses accusations contre une ethnie, ce qui est un délit. Ainsi l’alliance
politique qu’il dirige n’a pas hésité à accuser les Peuls d’avoir empoisonné ses militants. Ces allégations n’ont jamais été prouvées, d’autant que la responsabilité collective pénale imputable à
l’ensemble d’une ethnie n’existe pas. Toutes les personnes supposées avoir été empoisonnées s’en sont sorties sans aucun bobo.
Par contre, ces fausses accusations sont à l’origine de meurtres et autres assassinats et destruction des biens organisés de manière
simultanée dans plusieurs fiefs d’Alpha Condé contre des Peuls. Les auteurs n’ont jamais été inquiétés. Pire, la directrice de l’hôpital Ignace Deen Madame Diallo a été une deuxième fois démise
de ses fonctions sans doute pour n’avoir pas accrédité les accusations mensongères d’empoisonnement. Elle avait été licenciée une première fois par JMD qui n’avait pas supporté le démenti de la
directrice sur cette fausse allégation.
La directrice de Donka mise en cause par la Commission des Nations unies est tranquille. François Lounceny Fall qui a contribué à
cette rumeur est ministre d’Etat, Secrétaire général à la Présidence de la République. Il est le véritable PM de l’ombre.
Si Alpha Condé et sa multitude de conseillers ne connaissent pas le droit pénal, ils doivent savoir que le code pénal guinéen en son
article 139 prévoit que « Tout acte de racisme ou de régionalisme, de même que toute propagande à caractère racial, tribal ou subversif sera puni d'une
peine d'emprisonnement de 1 à 10 ans, sans préjudice des poursuites pour réparation des dommages matériels ou moraux que ces actes ont pu causer à l’Etat ou à des personnes physiques ou morales
».
Va-t-il oser nous parler de réconciliation nationale sans justice ? Croit-il qu’il suffit d’aller se prosterner sur les tombes de
Lansana Conté et de Sékou Touré pour apaiser la souffrance des victimes et de leurs proches. Pense-t-il pouvoir nous duper en parlant d’unité nationale quand il attise des haines ethniques et
récompense des assassins et violeurs ?
Comme l’a écrit Human Right Watch, «
…Se comportant davantage comme des prédateurs que des protecteurs, les membres des forces de sécurité de la Guinée ont depuis des décennies été laissés libres de commettre des exactions en toute
impunité, notamment l’extorsion de fonds, le banditisme, le vol, les enlèvements, le racket et l’usage excessif de la force létale, sans crainte apparente de devoir rendre compte de leurs actes
».
Pour la Commission d’enquête internationale « c’est cette culture d’impunité, aux multiples
conséquences désastreuses pour la démocratie et le développement, que la Commission voudrait contribuer à éradiquer, avec le concours de toutes les instances habiles à ce travail d’assainissement
».
Alpha Condé, on ne peut pas parler de réconciliation sans la justice. On ne peut pas bâtir l’unité nationale sur des propos
incitatifs à la haine ethnique. Et apprenez une fois pour toute que le viol n’est pas un acte banal, c’est un crime grave, qui laisse des séquelles et un traumatisme à vie. C’est un acte
révoltant et répugnant indigne d’un être humain. Son auteur doit être sévèrement sanctionné avec toute la rigueur de la loi.
Hassatou Baldé
Source : www.kylediallo.info partenaire de www.BanabanaNews.org